Conformément à ses objectifs initiaux, le Greshto a voulu donner au séminaire intitulé « Outils et techniques de l’orientation : éducation, formation et travail au XXe siècle » une triple dimension : l’interdisciplinarité, le décloisonnement des objets et enfin l’historicisation.
Les outils élaborés et mis en œuvre en orientation ont une longue histoire. Parmi eux les tests psychotechniques sont les plus connus mais les praticiens de l’orientation en ont inventé bien d’autres : fiches scolaires, médicales, d’observation ; multiples supports d’information, du buvard au cinéma et à l’informatique ; découverte des métiers et du travail, ateliers-écoles ; enquêtes sociales et socio-psychologiques ; didactique et pratiques pédagogiques. Dans ce panorama incomplet des institutions productrices d’outils jouent et un rôle central INETOP, ONISEP, Cérèq.
Les séances précédentes ont cherché à embrasser cette diversité des outils :
— Formation et orientation au prisme du droit : du droit collectif à l’individualisation du droit :
Le droit est trop souvent négligé : si la réglementation de l’orientation de la jeunesse est ancienne puisqu’on peut la faire remonter au décret-loi du 25 mai 1938 et à un décret de 1896, pour les salariés elle est plus récente
— Enquêtes, classifications et monographies professionnelles :
Les enquêtes portées par des institutions publiques comme le Cérèq ou celles, sociales et militantes de la JOC. Des enquêtes posant une série de questions : les commanditaires, les méthodologies, les réceptions et au final leur fonction de publicisation ou de mobilisation ? Leviers de transformations des pratiques ou des politiques ?
— Les outils socio-techniques de l’orientation : bilan de compétences et CEP en question
La question du bilan de compétences destiné aux adultes a fait apparaître plusieurs lignes de force. L’autonomisation d’un champ autonome d’orientation des adultes s’est faite à partir des années 1960 a d’abord été expérimentée sur les jeunes salariés pour répondre aux besoins de main-d’œuvre jusqu’aux années 1970. Au tournant des années 1980, de multiples dispositifs sont mis en place pour lutter contre le chômage des jeunes autour du triptyque : orientation/formation en alternance/insertion.
Le bilan de compétences institué en 1991 qui promettait des pratiques renouvelées n’a que partiellement répondu aux attentes. Les pratiques mises en oeuvre apparaissent éclectiques et mobilisent des tests que l’on-dit souvent abandonné. Les travaux menés sur le CEP vont béants le même sens posant la question de la demande réelle d’orientation.
Ce 3e temps de notre séminaire intitulé « Outils et techniques de l’orientation à l’articulation de l’éducation, de la formation et du travail : quelle(s) conséquence(s) pour l’orientation scolaire des années cinquante à aujourd’hui ? » aborde directement les outils élaborés et les pratiques au sein du système scolaire, autrement dit la manière dont la question des métiers et du travail est transformée en outils d’orientation. Comment la question du travail est-elle traitée à l’école ? Qu’est-ce que devient le travail à l’école ?
Ces questions s’enracinent loin dans l’histoire du mouvement d’orientation, à vrai dire à ses origines. D’abord en raison de l’héritage des « sciences du travail » qui synthétisaient études scientifiques du travail et réforme sociale. Il s’agit là d’un fil rouge, souvent tenu mais jamais totalement rompu.
De nombreux exemples jalonnent ce rapport originel entre orientation et travail et métiers.
— En 1907, un Service d’Informations professionnelles au sein de l’association des anciens élèves de l’École primaire supérieure Jean-Basptiste Say à Paris est ouvert. Il rédige plueiurs monographies professionnelles.
- En 1912, Alfred Binet collabore avec le Comité d’orientation professionnelle de la Société de protection des apprentis et des enfants employés dans les manufactures pour élaborer un « questionnaire destiné à condenser les renseignements utiles essentiels sur les écoliers en âge de choisir un métier ». La Société de protection des apprentis rédige « galement des monographies professionnelles ayant « pour base un questionnaire sur la profession ».
— Dans les années 1920, les ateliers-écoles de la Chambre de Commerce et d’Industries de Paris mettent en œuvre une « orientation expérimentale » par le travail ;
— Dans les années 1920 et 1930, les expositions de travaux d’élèves, les visites d’entreprises, les projections cinématographiques s’attachent à rendre concrets le travail et les métiers.
Ce fil rouge doit être cependant replacé dans le contexte français dans lequel l’orientation ; contrairement à d’autres pays comme l’Allemagne bascule précocement dans le giron de l’éducation. Au début des années 1920 encore, Jean-Maurice Lahy défend l'articulation de l’orientation avec les services de placement, donc du ministère du Travail. Les années 1930 feront basculer définitivement la question de l'orientation dans le cadre de l’Éducation nationale.
Ce fil rouge jamais rompu apparaît régulièrement. Quelques exemples :
— Décret n°96-465 du 29 mai 1996 relatif à l’organisation de la formation au collège
Article 8 – Afin de développer les connaissances des élèves sur l’environnement technologique, économique et professionnel, et notamment dans le cadre de l’éducation à l’orientation, l’établissement peut organiser, dans les conditions prévues par le code du travail, des visites d’information et des séquences d’observation dans des entreprises, des associations, des administrations, des établissements publics ou des collectivités territoriales ; l’établissement organise également des stages auprès de ceux-ci, pour les élèves âgés de 14 ans au moins qui suivent une formation dont le programme d’enseignement comporte une initiation aux activités professionnelles. En classe de troisième, tous les élèves accomplissent une séquence d’observation en milieu professionnel.
— le parcours Avenir : « Le parcours individuel, d’information, d’orientation et de découverte du monde économique et professionnel (article L. 331-7 du code de l’éducation)
Ce fil rouge revêt aujourd’hui une nouvelle actualité dans un contexte de polliniques publiques qui remettent l’accent sur le lien entre orientation et métiers.
— La loi Liberté de choisir son avenir professionnel en 2018 a confié l’information professionnelle aux régions ;
— L’élaboration d’un “Référentiel des compétences à s’orienter” par l’ONISEP
— La mise en place d’une « découverte des métiers au collège » (Note de service du 23-5-2023)
— Un nouveau stage d’observation a été institué en classe de seconde ;
Plusieurs interrogations se posent :
— Le cadre de la politique du ministère
— Ici comme toujours les mots ont une importance cruciale : derrière l’outil ou à son fondement, quelles définitions du travail et des métiers peut-on identifier ? L’articulation entre orientation scolaire et orientation professionnelle ?
— La réception, les appropriations et les usages différenciées par lés profession, conseillers mais aussi enseignants.
Autant de questions que nous poseroins à nos trosi intervenants que nous remercions et auxquels je cède la parole.
Jean GUICHARD, Centre de recherche sur le travail et le développement (CRTD), Conservatoire national des arts et métiers
Les méthodes DAPP (1987-1988-1991) : des ateliers d’éducation à l’orientation se centrant sur les activités personnelles et professionnelles.
Joël LEBEAUME, Laboratoire EDA – Faculté Sciences Humaines et Sociales – Sorbonne – Université Paris – Cité
L’éducation technologique au fils du temps : contenus, références, enjeux scolaires et éducatifs.
Erwan LEHOUX, Éducation scolarisation (ESCOL–CIRCEF) – Université de Paris 8
Education à l’orientation ou socialisation par anticipation à la loi du marché ? Enjeux des reconfigurations contemporaines du champ d’intervention professionnelle en orientation.
Jérôme Martin, Greshto.
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