Protagonisme en histoire et personnalisation en psychologie, un débat utile pour instruire le dialogue entre les deux disciplines ?
L’historien Haïm Burstin, dans ses travaux sur la Révolution française, a forgé le néologisme de « protagonisme » révolutionnaire qu’il définit comme l’étude de la construction de la subjectivité à travers la manière dont l’histoire affecte les acteurs impliqués dans un processus révolutionnaire, l’individu mobilisant des ressources psychologiques qui passent par la parole et la mise en scène de soi : « Dès qu’un événement traumatique atteint un corps social et parvient à mobiliser l’attention collective, les individus deviennent non seulement ses témoins et ses spectateurs, mais ils ont aussi tendance à intervenir en tant que participants, à devenir en somme de véritables protagonistes de l’Histoire » (Burstin, 2010, p. 8).
Le protagonisme fait ainsi écho à la notion de pouvoir d’agir en situation, développée notamment en psychologie du travail pour caractériser une action susceptible d’efficience et de sens, le pouvoir d’agir mobilisant des ressources (cognitives, affectives, sociales, techniques) et l’expérience des sujets. Dans ce cadre, on peut s’interroger pour savoir si les concepts de subjectivation et de personnalisation construits en psychologie peuvent-être rapprochés de la perspective protagoniste ?
Pour Philippe Malrieu qui s’appuie sur l’exemple de la construction de la personne politique de Saint-Just pendant la Révolution Française, « la personnalisation concerne toutes les situations qui exigent critique, changement dans les structures du milieu et dans celles des activités, sous le contrôle d’une interrogation au sujet des valeurs : de celles que l’on avait adoptées, lesquelles faut-il conserver ?» (2003, p. 10).
Burstin, H. (2010). « La biographie en mode mineur : les acteurs de Varennes, ou le « protagonisme révolutionnaire », Revue d’histoire moderne et contemporaine, vol. 57-1, 1, 7-24.
Malrieu, Ph. (2003). La construction du sens dans les dires autobiographiques. Toulouse : Edtions Erès.
Discutant : Jérôme Martin ([hercheur associé au CRTD-CNAM et GRESHTO]
Intervenant(e)s :
Julie Pagis [attachée de recherches au CNRS, CERAPS, Université de Lille 2:]
"Ce que l’événement fait à ses protagonistes : le cas de Mai 68"
Régis Ouvrier-Bonnaz [GRESHTO, CRTD, CNAM]
"La notion de personnalisation en psychologie, la construction de Saint-Just comme personne politique"
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